Marion Deschamp | Chercheuse associée

Ancien Membre
Centre Marc Bloch, Friedrichstraße 191, D-10117 Berlin
Email: marion.deschamp  ( at )  gmail.com Tél: +49(0) 30 / 20 93 70700

Institution principale : Université Neuchâtel (Suisse) | Position : Post doc position |

Bourse

2-jähriges Stipendium am Institut Francais d´Histoire en Allemagne (Frankfurt am Main) vom September 2009 bis August 2011.

Sujet de recherche

Christentum- und Reformationsgeschichte der Frühneuzeit
Protestantische Konfessionskulturen
Historische Bild-Anthropologie in religiöser Kontexten

Titre de la thèse
Les temples de la mémoire. Des recueils de portraits et de vies d’hommes illustres du protestantisme (XVIe- XVIIe siècles)
Résumé de la thèse

Mes recherches doctorales portaient sur la fabrique d’une culture spécifiquement protestante de la mémoire aux 16e et 17e siècles, que j ́analysais à travers un corpus de recueils de portraits et de vies imprimés, dédiés aux grands héros des Réformes protestantes. Parues, dès 1560, aussi bien en Suisse, qu’aux Pays-Bas, en Angleterre ou dans les terres d’Empire, ces collections « d ́hommes illustre en piété et doctrines » (Théodore de Bèze) semblaient faire fi des différends doctrinaux et des crispations confessionnelles apparus au sein du monde de la Réforme protestante pour célébrer dans un même élan Luther, Zwingli, Calvin, Bucer, Melanchthon et bien d ́autres partisans de la foi rénovée. Réunis post mortem dans ces galeries de papier, tous ces personnages semblaient comme réconciliés par l’image et aptes à promouvoir la conscience d’un « quant à nous » protestant supraconfessionnel. Il s’agissait donc de sonder l’émergence et l’affirmation des sentiments d’appartenance à un groupe (une communauté de foi) ne préexistant pas à ses premières représentations, et s’énonçant, dès lors, sur le mode performatif. Panthéons imaginaires et temples de la mémoire, les collections étudiées permettaient, par le mot et l’image, d’illustrer la construction de l’identité protestante à l’ère confessionnelle. J ́interrogeais ainsi les conditions d’adoption et d’adaptation dans le monde protestant, du goût humaniste à la mode : 1) par la pédagogie de l’exemple héroïque et la rhétorique encomiastique développées dans les Vies d ́hommes illustres ; 2) pour la disposition particulière à s’entourer des portraits de grands hommes. Si ces recueils faisaient leurs, en effet, la culture visuelle humaniste, ils devaient aussi concilier des interdits théologiques et moraux propres au rapport protestant à l’image. Ils prenaient en tout cas à contre- pied l’idée d’une iconomachie systématique des Réformes envers l ́image et posaient les limites pratiques de la licéité du portrait, tout en réinterrogeant les frontières entre vénération et commémoration des grands hommes dans la culture protestante. Ma thèse démontrait que la greffe de formes et figures humanistes sur le corps de redéfinitions théologiques mais aussi symboliques menées par les protestants permettait l’émergence de nouvelles pratiques visuelles et mémorielles : 1) en présidant, d’une part, au passage du culte à la culture de l’image, où cette dernière était désinvestie de la sacralité que les catholiques conféraient aux images des saints et déconnectée de l’économie du salut dans laquelle se mouvaient les icônes ; 2) en suggérant, aussi, le passage d’un culte des morts et des saints à une culture de la mémoire , où l’éternisation du souvenir des grands hommes n’était plus liée à leur puissance d’intervention auprès de la divinité. 

Directeur de thèse
Olivier Christin (Université de Neuchâtel)
Projets

Je débute un projet de recherche s ́attachant aux utopies littéraires produites dans l’Allemagne protestante des 16e et 17e siècles. Le genre utopique y prend d’abord, au début du 16e siècle, les accents chiliastiques des auteurs ralliés à la Réforme radicale puis, à partir du 17e siècle, ceux du mysticisme piétiste. Entre ces deux pôles, l’articulation produite par le discours utopique entre le pouvoir politique et l ́idéal religieux se transforme radicalement, et avec elle, l’aspect de la Cité chrétienne. Alors que les productions millénaristes se situent à la limite de l’utopie et du programme politique révolutionnaire, les œuvres piétistes entérinent le recul du motif de l’efficace politique, et placent la rénovation religieuse au sein de nouveaux topoi utopiques. Celui, d’abord, de l’entre-soi communautaire ; celui-ci aussi, du territoire de l’intime voire du jardin secret. Or, ce tropisme utopique migrant des avant-postes du combat politique aux confins de l’intériorité religieuse n’a jamais été étudié comme tel.  Il importe donc de réinterroger les liens entre radicalisme religieux et pensée révolutionnaire, pour mieux comprendre l’effacement de la pensée chiliariste au profit d’utopies piétistes portées par une élite bourgeoise de tendance réformiste.