Joseph Ciaudo | Mobilitätstipendiat

Ehemaliges Mitglied
Centre Marc Bloch, Friedrichstraße 191, D-10117 Berlin
E-Mail: jo.ciaudo  ( at )  hotmail.fr Tel: +49(0) 30 / 20 93 70700

Mutterinstitut : Université d'Heidelberg | Position : Postdoctoral fellow | Fachbereich : Geschichte |

Stipendium

Mon séjour au Centre Marc Bloch est cofinancé par une bourse donnée par le centre et la Fondation Maison Sciences de l'Homme.

Forschungsthema

Mon activité de recherche s’articule autour de trois principales thématiques de recherche :

  • 1) Histoire des concepts de « culture » dans le monde sino-mandchou et en Asie de l’Est (XIX-XXIe siècles) :

Cet axe de recherche recouvre un projet de grande ampleur, pensé sur plusieurs années, et que j’ai intitulé « Cartographie des concepts de la culture en Chine et Asie de l’Est : Sémantique historique et mobilisation sociale ». Il a pour ambition d’expliciter l’émergence et le processus de différenciation d’une série de concepts dans la langue politique et académique chinoise de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, concepts souvent uniformément traduits en langues occidentales par « culture ». Construit dans la continuité des récentes perspectives de renouvellement d’une histoire intellectuelle globale ou croisée, il cherche à élucider la formulation de discours sur la culture dans une série de contextes intellectuels et politiques spécifiques, tout en formulant des outils théoriques pour penser la culture. Méthodologiquement, le projet ambitionne de consolider une méthode d’histoire conceptuelle à la jonction de la Begriffsgeschichte germanique et de l’histoire intellectuelle de l’école de Cambridge, le tout en s’émancipant de la perspective nationale. L’histoire sémantique des concepts chinois est à ce titre replacée dans le contexte plus large de l’histoire de ces concepts au niveau asiatique (une perspective comparative et transnationale est notamment envisagée avec le Japon, la Corée et le Vietnam – faute de sources adéquates, la langue mandchoue est pour l’instant laissée de côté). Plus largement, la démarche s’inscrit dans le projet d’histoire croisée initié par Michael Werner et Bénédicte Zimmermann dans leur manifeste pour une histoire intellectuelle entre empirisme et réflexivité.

 

  • 2 ) Introduction et traduction de la philosophie occidentale en Chine :

Dans le cadre de cette seconde thématique de recherche, je m’intéresse plus particulièrement à la réception de la philosophie française en Chine au début du XXe siècle. Mon corpus de prédilection est l’œuvre d’Henri Bergson, philosophe qui eut un rôle décisif pour de nombreux penseurs chinois dans leur projet de modernisation de la philosophie traditionnelle chinoise. J’ai jusqu’à présent accordé une attention particulière à la notion d’intuition et à la manière par laquelle elle fut traduite et réappropriée en Chine. J’ai notamment défendu dans plusieurs articles, la thèse d’une moralisation de la philosophie de Bergson en Chine.

 

  • 3) Confucianisme et projets politiques dans la Chine des XXe et XXIe siècles

Ce troisième axe de recherche ciblé sur le confucianisme recoupe les deux premiers axes en considérant comment les débats autour du confucianisme — qu’ils s’agissent de la construction du confucianisme comme cœur de la culture chinoise ou comme philosophie intuitiviste en dialogue avec la philosophie européenne — ont participé à une redéfinition de la place du confucianisme dans le politique chinois et dans les politiques mis en avant par certains acteurs. Ma thèse de doctorat a, à cet égard, porté sur un des plus grands hommes politiques chinois de la période républicaine, Zhang Junmai (1887-1969), également connu pour être un des principaux représentants du néoconfucianisme contemporain. J’ai étudié comment ses projets politiques ont toujours laissé une part belle au confucianisme. J’ai également édité ses notes de cours à l’Université de Iéna en 1929, en un ouvrage paru chez Vittorio Klostermann. Les histoires de la philosophie néoconfucéenne rédigées par Zhang peuvent être lues comme des manifestes politiques. 

Titel der Dissertation
Sinodicée en question : Essai d’histoire intellectuelle à partir des discours culturalistes de Zhang Junmai (1919-1931)
Zusammenfassung der Dissertation

Cette thèse de doctorat se propose d’étudier la formulation de discours à propos des « cultures/civilisations » occidentale et chinoise en Chine entre 1919 et 1931, en prenant les textes de Zhang Junmai 張君勱 (1987-1969) comme point focal. La problématique centrale de ce travail est de mettre en lumière ce que j’ai appelé la « sinodicée » de Zhang Junmai, c’est-à-dire sa théorie justificatrice de la culture chinoise, théorie entendue à la fois dans son articulation conceptuelle et dans sa présentation discursive. Grâce à une étude détaillée des écrits de Zhang Junmai, ce travail offre une perspective nouvelle sur les trajectoires et les usages des expressions « culture chinoise » et « culture occidentale » dans le contexte de la Chine moderne. À travers une critique de précédents travaux peu sensibles aux problématiques soulevées par l’histoire sémantique et conceptuelle, est proposée une remise en question des principales grilles conceptuelles utilisées dans l’étude de l’histoire intellectuelle et politique de la Chine des années vingt. Face à la thèse de « la renonciation au politique » en vogue dans les travaux sur cette période, je montre au contraire que les débats autour de la notion de « culture » sous-tendent une refonte du répertoire conceptuel pour penser le monde et le politique. Par là, je montre que la sinodicée de Zhang Junmai n’est en rien un projet de type identitaire : la défense de la culture chinoise, et plus particulièrement du néoconfucianisme chez Zhang n’étant pas une valorisation d’un passé sacralisé, mais la revendication d’une indépendance chinoise et d’une capacité du peuple chinois à s’autodéterminer à travers la reconstruction du politique en Chine.

Le cadre de la thèse dépasse donc la simple biographie intellectuelle. À travers l’étude des textes de Zhang Junmai en chinois et en langues européennes — une place importante est donnée aux textes germaniques de Zhang, notamment ceux qui furent écrits lors de son troisième séjour en Allemagne (1929-1931), un corpus ignoré des précédentes recherches[1] — textes qui servent de portes d’entrée sur le monde intellectuel chinois du début du XXe siècle, je reconstruis partiellement l’histoire du concept de « culture » en chinois wenhua 文化, en prenant en compte ses liens avec les concepts similaires tirés qui peuvent être trouvés en allemand, anglais, japonais et français. Chemin faisant, la thèse cherche à renouer le problème de la culture et l’émergence d’une philosophie chinoise moderne à la question du politique. Enfin, la thèse soulève un certain nombre de problèmes épistémologiques sur l’emploi de la catégorie scientifique de « culture » pour aborder les textes de l’époque du Quatre mai 1919. Le corps du texte est divisé en trois parties respectivement dédiées 1) au contexte et à la vie de Zhang Junmai, 2) aux grands débats dits culturalistes et à la cartographie des concepts qui furent employés dans ceux-ci, 3) à la sinodicée de Zhang Junmai et à son plaidoyer en défense du néoconfucianisme.

D’un point de vue méthodologique la thèse est construite dans la logique d’une histoire conceptuelle à la jonction de la Begriffsgeschichte germanique et de l’histoire intellectuelle de l’école de Cambridge, le tout en s’émancipant de la perspective nationale. Plus largement, la démarche s’inscrit dans le projet d’histoire croisée initiée par Michael Werner et Bénédicte Zimmermann dans leur manifeste pour une histoire intellectuelle entre empirisme et réflexivité (2004).

 

[1] La soutenance de la thèse a été accompagnée par la publication d’un ouvrage inédit rédigé en allemand par Zhang Junmai en 1931 : CHANG, Carsun, ROETZ, Heiner (ed.), et CIAUDO, Joseph (ed.), Geschichte der Neokonfuzianischen Philosophie vom 10. Jahrhundert bis zur Mitte des 19. Jahrhunderts, Frankfurt, Main Klostermann, 2016

Betreuer
Frédéric Wang & Anne Cheng
Projekte

La recherche que je conduis au Centre Marc Bloch s’intègre dans un projet de grande ampleur que j’ai intitulé « Cartographie des concepts de la culture en Chine et Asie de l’Est : Sémantique historique et mobilisation sociale ». Ce projet de recherche a pour ambition d’expliciter l’émergence et le processus de différenciation d’une série de concepts dans la langue politique et académique chinoise de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, concepts souvent uniformément traduits en langues occidentales par « culture ». Construit dans la continuité des récentes perspectives de renouvellement d’une histoire intellectuelle globale ou croisée, il cherche à élucider non seulement la formulation de discours sur la culture dans une série de contextes intellectuels et politiques spécifiques, tout en formulant des outils théoriques pour penser la culture. Méthodologiquement, le projet ambitionne de consolider une méthode d’histoire conceptuelle à la jonction de la Begriffsgeschichte germanique et de l’histoire intellectuelle de l’école de Cambridge, le tout en s’émancipant de la perspective nationale. Plus largement, la démarche s’inscrit dans le projet d’histoire croisée initiée par Michael Werner et Bénédicte Zimmermann dans leur manifeste pour une histoire intellectuelle entre empirisme et réflexivité. Suivant leurs recommandations, ce projet se construit sur « une triple procédure d’historicisation : de l’objet, des catégories d’analyse et des rapports entre le chercheur et l’objet » (Werner & Zimmermann 2004 : 10). Ce séjour au Centre Marc Bloch est pour moi l’occasion de renforcer les assises méthodologiques de mon projet, en prenant connaissance des derniers développements la Begriffsgeschichte en Allemagne.

Publikationen

Livre:

CHANG, Carsun, ROETZ, Heiner (ed.), et CIAUDO, Joseph (ed.), Geschichte der Neokonfuzianischen Philosophie vom 10. Jahrhundert bis zur Mitte des 19. Jahrhunderts, Frankfurt, Main Klostermann, 2016.  

 

            Articles dans des revues  (ou sites) à comité de lecture:

Ciaudo, Joseph, « Bergson’s “intuition” in China and its Confucian fate (1915-1921): Some remarks on zhijue in Modern Chinese Philosophy », Problemos, Supplement 2016, pp. 35-50

 

Ciaudo, Joseph, « Une lecture chinoise d’Arnold Toynbee : Zhang Junmai et le problème de la continuité historique de la culture chinoise », Études asiatiques, vol. 70, n°1, 2016, pp. 1-11.

 

Ciaudo, Joseph, « Replacer Chen Duxiu dans son vocabulaire : La Nouvelle Jeunesse et le problème de la culture chinoise », Oriens Extremus, n°54, 2015, pp. 23-57.

 

Ciaudo, Joseph, « Zhang Junmai / Carsun Chang » [en ligne], Site internet à comité de lecture Internet Encyclopedia of Philosophy, 2014, <http://www.iep.utm.edu/>

 

Ciaudo, Joseph, « Introduction à la métaphysique bergsonienne en Chine : échos philosophiques et moralisation de l’intuition », Noesis, « Numéro spécial : la traduction philosophique », 2013, n°22, pp. 293-328.

 

          Chapitres dans des ouvrages:

Ciaudo, Joseph, « Défendre un passé, construire un avenir: La culture en débat dans la Chine des années vingt », in in Fries-Paoila C., Gothuey J., Kessler-Bilthauer D., Panisset T., & Reinert E., (dir.), Étudier la culture aujourd’hui : enjeux identitaires, numériques, artistiques et spatiaux d’un objet de recherche pluriel, Nancy, Presse de l’Université de Nancy / Éditions Universitaires de Lorraine, 2017, pp. 35-52.

 

Ciaudo, Joseph, « Nachwort: Von Geschischte der Neokonfuzianischen Philosophie zu A development of Neoconfucian thought: Carsun Chang als Neokonfuzianismushistoriker », in Geschichte der Neokonfuzianischen Philosophie vom 10. Jahrhundert bis zur Mitte des 19. Jahrhunderts, Frankfurt: Main Klostermann, 2016, pp. 395-409.