Front pour une révolution anti-impérialiste, populaire et panafricaine (FRAPP) : microhistoire d’une organisation citoyenne au Sénégal
Edition: IRIS Éditions
Collectiion: Dans "Revue internationale et stratégique" 2024/1 (N° 133)2024/1 (N° 133), pages 143 à 153
ISBN: ISSN 1287-1672
Veröffentlicht am: 01.04.2024
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L’apparition et le développement croissant de mouvements citoyens impliqués dans la contestation de l’ordre politique et institutionnel et de l’hégémonie capitaliste néolibérale sont un des faits marquants des deux dernières décennies en Afrique francophone. Le vent du « dégagisme » qui souffle au Mali, au Burkina Faso et au Niger combiné aux répercussions géopolitiques de la guerre en Ukraine ne semble ainsi pas près de s’essouffler.
Le Sénégal, tête de pont de la pénétration coloniale française en Afrique au XIX e siècle, n’échappe pas à cette tempête. Cette exception sénégalaise, perçue comme proche de la France, a connu ces cinq dernières années des contestations fréquentes liées à la présence encore importante des intérêts économiques de l’ancienne puissance coloniale. En mars 2021, des enseignes françaises – Total et Auchan, notamment – ont été saccagées ou brûlées par des manifestants, au point d’accréditer la thèse de l’existence d’un « sentiment antifrançais » au Sénégal.
Le présent texte se donne pour objectif de décrypter la réalité de ce « sentiment antifrançais » au Sénégal en s’appuyant sur l’exemple du Front pour une révolution anti-impérialiste, populaire et panafricaine (FRAPP), considéré comme le porte-étendard de ce « ras-le-bol ». Il s’agit de dépasser cette perception en montrant qu’à côté du combat anti-impérialiste et donc pour partie antifrançais, plus médiatisé, le combat principal du FRAPP s’oriente davantage vers la protection et l’encadrement des populations. En effet, l’engagement citoyen par le bas de cette organisation qui développe progressivement son action sur l’ensemble du territoire sénégalais reste une dimension encore très peu connue et médiatisée.
D’où vient le mouvement ? Comment fonctionne-t-il ? Pourquoi l’identité du FRAPP se confond-elle au slogan « France dégage ! » ? Quel est son mode d’implantation sur le terrain ? Quels sont les combats qu’il mène ? En quoi peut-il avoir des liens ou être influencé par les organisations politiques de la gauche sénégalaise ? Autant de questions dont les réponses aideront à faire une étude microhistorique d’un mouvement aux contours politiques et idéologiques encore non identifiés dans la littérature académique. Un corpus documentaire composé de textes officiels de l’organisation, de ses rapports d’activités, de ses publications sur Internet et les réseaux sociaux, des journaux, etc., et une série d’entretiens menés auprès des membres du FRAPP permettent ainsi de déconstruire la représentation antifrançaise de ce mouvement et de le situer dans une perspective de l’histoire des relations entre le Sénégal et la France.