Le projet de doctorat s'interroge sur la manière dont les frontières facilitent des dynamiques autoritaires au sein des ordres libéraux-démocratiques. Cette question est rendue possible par une conception changée des frontières, qui ne les identifie plus exclusivement avec les lignes de démarcation extérieures des États-nations. Si les frontières sont reconsidérées comme des institutions politiques complexes et étendues dans l'espace, on peut se demander comment elles modifient les sociétés en interne. Pour cela, le projet adopte une approche interdisciplinaire qui allie la théorie politique avec les travaux empiriques existants qui permettent une « description dense » (C. Geertz) des modes de fonctionnement des frontières. Les pratiques de délimitation (contrôles migratoires, expulsions, etc.) - selon l'argument général - (i) génèrent et exacerbent les antagonismes sociaux, (ii) élargissent la capacité des États à capturer les individus et à contrôler leurs interactions quotidiennes et (iii) facilitent la circulation de formes de violence sanctionnées par l'État ainsi que de formes de violence extra-légales. À travers ces trois axes, le projet vise à retracer les dynamiques autoritaires des frontières et à éclairer leurs implications théoriques pour la démocratie. Il s'appuie sur des travaux récents en philosophie politique qui ont analysé comment les droits démocratiques et les possibilités de participation sont menacés par une politique de frontières de plus en plus restrictive. Cependant, contrairement à ces travaux, il ne conçoit pas les frontières comme quelque chose d'extérieur et d'opposé à l'ordre libéral. Au contraire, les frontières doivent être comprises comme composante intégrale des conceptions libérales de l'ordre. C'est ici que le projet de doctorat prend un nouveau départ, en examinant dans quelle mesure les tendances autoritaires - médiatisées par différentes pratiques de délimitation - sont ancrées à l'intérieur des démocraties libérales elles-mêmes. De cette manière, le projet espère montrer que les relations démocratiques doivent toujours être revendiquées et défendues contre les frontières et la violence qu'elles introduisent dans le monde.