État, normes et conflits politiques

Responsables: Daniela Heimpel, Marieke Louis, Alexandra Oeser

Co-organisateurs: Mathias Delori

Le pôle « Etat, normes et conflits politiques » souhaite réunir et confronter des travaux de sciences sociales consacrés aux conflits politiques, à leur dynamique et leur résolution, en portant une attention particulière à la manière dont ceux-ci affectent les normes juridiques, bureaucratiques, mais aussi sociales et professionnelles (et vice et versa).

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L’analyse des conflits politiques, de leur cristallisation et de leur résolution nous renseigne sur ce qui fait qu’une société « tient » ou, au contraire, se désintègre. Examiner la manière dont certains problèmes se trouvent posés et politisés en termes de conflit, revient souvent à poser la question des normes partagées, au sens large du terme, puisque le conflit généralisé est la forme extrême d’anomie.

Quant aux efforts destinés à désamorcer, apaiser ou régler les conflits, ils ne sont jamais politiquement neutres et nous renseignent aussi sur les acteurs et actrices (étatiques ou non) qui en ont la charge. Le traitement politique des conflits peut stabiliser les sociétés, tout en menant à leur transformation, voire à leur désintégration. En effet, le règlement des conflits peut d’une part réduire les clivages et les tensions et renforcer ainsi la cohésion sociale. D’autre part, l’action politique peut créer des polarisations et ainsi initier ou aggraver des conflits préexistants.

 

Les travaux ici réunis relèvent de trois thématiques principales : violence, crises et sorties de conflits (1) ; mobilisations et engagement politiques (2) ; institution et appropriation des normes juridiques (3).

1. Violence, crises et sorties de conflits

Les recherches sur ce thème s’intéressent aux pratiques violentes et aux institutions qui leurs sont, éventuellement, associées, dans le contexte de crises et conflits plus ou moins aigus, ou dans le cadre stabilisé des systèmes politiques les plus variés (qu’ils soient démocratiques libéraux ou autoritaires). Parmi les questions abordées dans cette optique, mentionnons, d’abord, celle de la formation, de la construction et de la stabilisation des systèmes politiques ; celle, ensuite, des formes et modalités de la violence, que celle-ci soit physique ou symbolique, institutionnelle (exercée par l’État, les entreprises, les Églises…) ou davantage diffuse et généralisée ; celle, également, de la dynamique propres des crises politiques et des bouleversements sociaux qui les accompagnent ; celle essentielle, enfin, des processus de sorties de conflits, qui se caractérisent souvent par leur dimension juridico-politique.

2. Mobilisations collectives et engagement politique

Un deuxième ensemble de travaux porte sur les mobilisations autour de causes variées et la construction de problèmes publics d’une part ; sur la participation et l’engagement politiques, d’autre part. Il s’agit de réfléchir d’abord à ce que font les causes aux groupes qui les construisent et les portent et, inversement, aux effets des dynamiques collectives sur la manière dont les problèmes émergent et sont configurés dans l’espace public. L’affirmation souvent conflictuelle d’un « nous » passe en effet par une catégorisation du monde social et à un point de vue sur celui-ci. En font partie les mobilisations les plus variées pour la reconnaissance d’un groupe et sa participation à la vie politique, dont les approches intersectionnelles – analysant l’entrelacs pratique des rapports de genre, de race et de classe – ont souligné la complexité. La question de la participation est, ensuite, indissociable de celle de l’engagement politique, dans les domaines les plus divers de la vie sociale, qu’elle soit professionnelle, familiale, militante…

3. Institution et appropriation des normes juridiques

Les recherches relevant de cette thématique s’intéressent à la formation, à l’institutionnalisation et à la mise en œuvre concrète des systèmes normatifs, en particulier juridiques, par une pluralité d’acteurs agissant à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Etat. Le droit en effet n’est pas seulement produit et pratiqué par les experts légitimes que sont les juristes professionnels, mais aussi par des profanes, associés formellement à l’institution (jurés de cours d’assises) ou extérieurs à celles-ci, capables de s’approprier les règles instituées et, parfois, de les retourner contre l’Etat (militants). Ces tensions dans la production et la pratique juridiques sont palpables aussi bien à l’échelle nationale qu’internationale.