Mobilités, Migrations, Recomposition des espaces
Responsables: Denis Laborde, Esther Möller
Co-organisateurs: Layla Kiefel, Alice Lacoue-Labarthe
Les thèmes du pôle sont la transformation des espaces, l’évolution des mobilités et les processus migratoires. Les dimensions temporelle, sociale et spatiale du changement sont interrogées dans une perspective interdisciplinaire.
Les chercheur.e.s du Pôle « Mobilités migrations, recomposition des espaces » se confrontent aux transformations et reconfigurations des espaces, dans un contexte de mutations des cadres institutionnels, des frontières et des personnes. Le pôle s’appuie sur les acquis de recherches développées au CMB depuis les années 1990, qu’il prolonge et reformule dans une nouvelle perspective. Le pôle revendique une démarche empirique qui met l’accent sur l’aller-retour entre des terrains situés, les catégories analytiques et la construction des postures théoriques. Une autre de ses caractéristiques est de prendre l’Europe comme cadre, en se focalisant sur des espaces particuliers : tout particulièrement l’Europe orientale, la France, l’Allemagne. En même temps, il prend aussi en considération des processus globaux et des espaces hors de l’Europe (ex. Afrique du Nord et de l’Ouest ou Amérique latine) et mène des comparaisons interrégionales.
La ville, le quartier, la région, les espaces frontaliers sont par ailleurs les points d’ancrage de recherches fortement marquées par le spatial turn. L’Europe est comprise comme un espace social dont la cohérence est interrogée.
La comparaison franco-allemande est un point fort des recherches. L’hypothèse de la convergence européenne ou à l’inverse celle d’une différence persistante des processus sociaux entre pays pourtant proches et intimement associés sont ainsi mises à l’épreuve. Les recherches empiriques effectuées en Europe centrale et orientale ainsi que les comparaisons avec d’autres régions du monde permettent par ailleurs de mieux interroger les processus de régionalisation, les mouvements migratoires et les mobilités.
Les travaux comparatifs sur les sociétés de deux pays qui sont au cœur de l’espace et des institutions européennes permettent de faire dialoguer les traditions et approches scientifiques françaises et allemandes. Le couple espace/migration met en évidence les différences franco-allemandes : la France historiquement marquée par l’empreinte du fait colonial sur les migrations des „suds“, et l’Allemagne par la politique des Gastarbeiter, dans une confrontation entre des modèles étatiques centraliste ou fédéraliste. On en mesure l’effet sur les processus migratoires actuels ainsi que sur la réception du fait migratoire.
La recherche sur l’Europe orientale s’appuie sur les acquis du projet « les frontières fantômes en Europe Centre-Orientale » qui a proposé une nouvelle façon de penser la formation des « frontières culturelles » en Europe. Aujourd’hui, l’Europe orientale se réaffirme avec force comme champ à investiguer, quand la déstabilisation récente à l’Est remet en tension l’espace européen.
Trois directions thématiques sont privilégiées :
(1) « Migration et mobilité : acteurs et pratiques »,
La forte augmentation récente des mobilités et des migrations au-delà des frontières nationales constitue une transformation sociétale majeure. La mobilité est généralement considérée comme un signe de réussite socio-économique. Toutefois, une grande partie des personnes mobiles vit dans des conditions de grande précarité, comme les réfugié.e.s. De ce fait, l’injustice sociale est aujourd’hui une dimension centrale des mobilités. Il s’agit donc de savoir comment les mobilités se répartissent dans la société et d’identifier les politiques au niveau européen, national et local qui favorisent ou au contraire limitent les mobilités.
(2) « Différenciation socio-spatiale et polarisation dans la ville »,
Mobilités et migrations amplifient les processus de différenciation sociale. La polarisation est particulièrement visible dans les villes, notamment du fait de l’existence de quartiers affectés par une ségrégation ethnique et sociale. L’augmentation des loyers et la privatisation de logements sociaux compliquent, pour les groupes de population relativement pauvres, l’accès à des logements bon marché et à des ressources suffisantes. Les minorités ethniques sont de surcroît souvent discriminées. Nous étudions aussi les changements induits par la migration et la mobilité au niveau macro, leurs traductions dans la ville et leurs conséquences pour les différent.e.s citadin.e.s.
(3) « Frontières, circulations, production de la différenciation spatiale en Europe ».
On interroge ici les pratiques et processus de production des frontières, la labilité des phénomènes de différenciation spatiale, ainsi que les modes de légitimation de ces différences. En mobilisant les acquis des travaux sur les espaces-frontières on est en mesure de poser la question des nouvelles régionalisations de l’Europe, considérées comme des processus dynamiques. À ce titre, l’Europe orientale, à nouveau en forte recomposition, affectée par de nouvelles tensions et des représentations culturelles et politiques à forte composante « essentialiste », est un champ prioritaire dont le pôle entend se saisir.