Forschungskolloquium
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Glaubensbekenntnis und Politik der Affirmation
20. Februar | 10:00
Confession de foi et politique de l'affirmation
Philippe Büttgen
La question « Que m’est-il permis d’espérer ? » délimite depuis Kant la place que la philosophie donne à la religion : coup génial, qui à la fois va chercher dans la religion ce que la philosophie ne sait pas donner, l’espérance, et assigne la religion à résidence, la met à sa place. Cette place n’est pas rien, comme le montrent a contrario les efforts toujours renouvelés des philosophies pour (re)donner – malgré tout – un peu d’espoir, à travers la sagesse ou la révolution. Mais elle n’est pas tout. Car si nos religions posent bien la question de savoir ce qu’il nous est permis d’espérer, elles la posent à partir d’une autre question, préliminaire : « Que m’est-il permis d’affirmer ? »
Ma réflexion partira de plusieurs équivoques, toutes liées à la confession, c’est-à-dire au confiteor latin. La confession est l’aveu des péchés et la proclamation d’une foi : quel rapport entre les deux ? Il s’agit à chaque fois d’un acte accompli en parole : confesser ses péchés, confesser sa foi, à chaque fois en les disant. Mais ce n’est pas tout. La confession de foi désigne un acte et un texte : les grands débats doctrinaux du premier christianisme, mais aussi la partition de celui-ci à l’époque moderne, se sont toujours menés confession contre confession, formulaire contre formulaire. Acte, texte – et le dernier rebondissement dans l’histoire sémantique de la confessio n’est pas le moins étrange : à partir du xvie siècle, au terme d’un processus encore obscur, la confession en vient à désigner le groupe ou la communauté qui professe une même foi et se réclame d’un même formulaire. « Confessionnel » se dit aujourd’hui en ce sens, communautaire ou social ; « confessionnalisation » aussi, à propos des pays d’Europe et d’Amérique du Nord qui connaissent depuis quatre siècles ce que la France découvre depuis peu : la pluralité religieuse et les risques de sa gestion politique.
La confession désigne donc l’acte d’un individu, le texte dans lequel se reconnaît un groupe, et ce groupe même. L’hypothèse sera que cette réunion, ou cet amalgame de la voix, du texte et du social, constitue une donnée immédiate des politiques contemporaines.
Il est en effet temps de se demander pourquoi la politique s’énonce encore dans des textes déclaratifs, manifestes ou, comme le montrent nos boîtes aux lettres par temps d’élection, « professions de foi ». Il est temps aussi de se demander comment il se fait que nos droits ne sont des droits que dans la mesure où ils se déclarent, et quel est le rapport entre ces déclarations (d’Indépendance, des droits de l’homme et du citoyen) et la forme plus ancienne de la confession de foi. La question s’approfondit à travers la comparaison entre l’énumération des droits dans les déclarations et celle des articles de foi dans les confessions.
Que m’est-il permis d’affirmer ? La question désigne une exploration à conduire à l’intérieur de l’acte d’affirmation, en partant de la sensibilité nouvelle que la philosophie contemporaine manifeste pour sa nature de cet acte (performatif ou non – Austin) et pour ses effets (politiques et religieux – Foucault, Derrida, Agamben, Balibar).
Il s’agit de savoir ce qu’affirmer veut dire, en philosophie et en politique, et quel lien précis se noue avec qui se donne de façon immédiate comme sa matrice religieuse, la confession ou homologia. J’entends montrer que c’est ici, au cœur de l’énonciation, que se pose le plus profondément la question de la sécularisation de nos formes de pensée.
Redner: Prof. Dr. Philippe Büttgen (Centre Marc Bloch)
Kommentar: Prof. Dr. Andrea Allerkamp (Universität Viadrina)
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